François Bayrou et la réforme des retraites : négociations ou piège béant ?

Publié le par Bernard Aubin

L’intervention du Premier ministre devant le Parlement fera sans doute revenir à la surface quelques tristes souvenirs aux cheminots. Début 2018, Jean-Cyril Spinetta remettait au Gouvernement le rapport qu’il lui avait commandité quelques mois plus tôt.

L’avenir de l’entreprise publique s’était donc trouvée entre les mains de l’ex-PDG d’Air France qui n’avait pas eu le temps ni les dispositions matérielles indispensables pour mener un travail de fond. Et comme par hasard, les conclusions du rapport se révélèrent en parfaite adéquation avec  les pistes exposées par le Gouvernement de l’époque : éclatement de la SNCF en Sociétés Anonymes et abrogation du Statut des cheminots.

Le rapport Spinetta ne constituait donc qu’un alibi à des orientations arrêtées d’avance. Et les « négociations » qui s’ensuivirent ne portèrent que sur la longueur de la corde avec laquelle le personnel et son entreprise seraient pendus.

Aujourd’hui, tout en brandissant « une fenêtre de tir » jusqu’en 2026, et la « recherche d’une voie de réforme nouvelle sans aucun totem et sans aucun tabou », l'ouverture d’esprit de François Bayrou a priori séduisante se heurte à deux réalités presque insurmontables.

Le temps consacré à la « négociation » tout d’abord. Les partenaires sociaux ne disposeront que de 3 mois à dater de la restitution par la Cour des Comptes de son rapport sur le financement des pensions. Impossible de concrétiser quoi que ce soit dans un délai aussi court.

Question fondamentale  : les échanges pourront-ils (enfin) porter sur la recherche de nouvelles pistes de financement des retraites, sujet délibérément écarté de la précédente réforme ? Sinon, à paramètres inchangés, il semble difficile d’aboutir à une alternative crédible.

S'ajoute à cette situation un risque non-négligeable : les propositions qui pourraient émaner des syndicats d’accompagnement. Par exemple la mise en place d’une redoutable retraite par points plébiscitée par l’un d’eux. Elles pourraient aboutir à des mesures encore pires que celles actuellement programmées !

Et si les « négociations » capotent, ce sera forcément la faute des syndicats : « si (...) cette délégation trouve un accord d'équilibre et de meilleure justice, nous l'adopterons. (...) Mais si les partenaires ne s'accordaient pas, c'est la réforme actuelle qui continuerait à s'appliquer ». Une stratégie cousue de fils blancs : tout est dit, tout est écrit. On ne change pas les méthodes qui ont fait leurs preuves !

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