Catastrophe ferroviaire en Grèce : identifier les véritables causes
/image%2F1793711%2F20230302%2Fob_3abc6f_accident-train-grece-0010123.jpg)
38 morts dans cette catastrophe sans précédent en Grèce… Des syndicats qui pointent du doigt la vétusté et le manque d’entretien du réseau sur fond de crise économique, un agent-circulation accusé de négligence par le Premier ministre grec… et des heurts qui surviennent à proximité du siège de la compagnie ferroviaire Hellenic Train à Athènes, le 1er mars 2023… Après l’émotion occasionnée par ce dramatique accident, prenons du recul et venons-en aux faits.
Les images
Les images révèlent que la ligne empruntée par les deux trains en cause est à double voie et électrifiée. Il ne s’agit donc pas d’une technologie ancienne. En exploitation habituelle, les trains de chaque sens empruntent une voie dédiée. Ils ne peuvent donc entrer en collision frontale.
Les risques liés à l’exploitation ferroviaire
Ils sont au nombre de trois : le rattrapage (un train circulant sur la même voie qu’un autre percute par l’arrière le train précédent), la prise en écharpe (un train en provenance d’un itinéraire sécant percute latéralement un autre train), le nez-à-nez : deux trains de sens contraire se percutent frontalement sur la même voie : c’est le type d’accident survenu en Grèce.
Les parades
Les réglementations ferroviaires stipulent des conditions d’exploitation des réseaux ferrés qui écartent ces risques. En cas de respect strict de la réglementation, aucun accident ne peut survenir. Depuis la création des chemins de fer, des « installations de sécurité » ont progressivement été implantées sur le terrain pour matérialiser cette réglementation. En principe, et sauf dans des cas spécifiques, l’erreur humaine ne peut causer d’accident. En l’espèce, les installations de sécurité grecques auraient dû empêcher l’expédition d’un train vers un autre circulant sur la même voie en sens opposé.
Les interrogations
Plutôt que d’évoquer immédiatement la vétusté du réseau ou l’erreur humaine, il y a lieu de s’interroger sur la nature même des installations qui équipent la ligne en cause, leur pertinence, leur fiabilité, leur état. Il saute aux yeux qu’un premier problème apparaît à ce stade, car si l’humain est mis en cause, c’est que les installations qui auraient dû assurer la sécurité n’étaient pas opérationnelles ou clairement défaillantes, ou alors que leur fonctionnement a été contourné sans respect de la réglementation.
Les responsabilités
Il appartiendra aux enquêteurs de déterminer les responsabilités dans l’ordre suivant : identifier la nature, le rôle, le fonctionnement et les éventuels dysfonctionnements des installations de sécurité gérant la ligne ; identifier les motifs, le contexte et les décisions qui auraient pu mener à l’altération du fonctionnement de ces organes ; identifier la part de responsabilité attribuée à l’agent responsable des circulations, sa formation, sa charge de travail, le contexte dans lequel il évolue ; s’attacher enfin à la gestion globale de la sécurité des circulations par l’opérateur, effectuer des retours d’expérience sur des événements passés qui auraient pu alerter sur les risques d’accident.
En conclusion
Laissons l’enquête suivre son cours. Comme dans de nombreux cas, l’ « erreur humaine » très tôt pointée du doigt révélera sans doute une situation bien plus complexe et des responsabilités partagées. Alors, pas de précipitation ni de conclusion hâtive.