#reformedesretraites : quand Laurent Berger refuse d'être un mouton.
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Qui l'eut cru ? La CFDT en tête de la contestation !? Impensable avant Macron !
Petit cours de syndicalisme pour commencer. Au premier jour, il y eut la CGT. Un syndicat « révolutionnaire ». Définition : organisation qui tend à bouleverser les règles établies, voire à les renverser, afin d'en instaurer d'autres plus favorables aux salariés.
Au second jour, il y eut la CFTC. La riposte des « chrétiens » au « syndicalisme rouge ». CGT et CFTC partageaient le même but : améliorer les conditions des travailleurs. Les uns essentiellement par la contestation, les grèves, les manifestations. Les autres par le dialogue, l'action n'étant utilisée qu'en dernier recours. Les syndicats apparus par la suite s'inscrivirent longtemps dans ces deux seules tendances. Ainsi, la CFDT née en 1964 de la CFTC fut longtemps « réformiste », au point que de nombreux médias la qualifient encore aujourd'hui de ce vocable.
Sauf que depuis des années, une nouvelle tendance syndicale a progressivement émergé : le « syndicalisme d'accompagnement ». Il ne s'agit plus, pour les organisations concernées, de conquérir forcément de nouveaux droits ou de défendre tous les acquis. La nouvelle mode consiste la plupart du temps à prendre acte des évolutions proposées puis à les accompagner plutôt que de les contester, même lorsqu'ils occasionnent des reculs sociaux indéniables. Ainsi, les conflits majeurs et les grèves coûteuses sont évitées. Une philosophie à distinguer du « réformisme » ou du syndicalisme révolutionnaire dont les actions visent, répétons-le, à AMELIORER la situation des adhérents et à défendre les acquis.
Chaque salarié a bien entendu le droit de se reconnaître dans tel ou tel type de syndicalisme ou... dans rien du tout. Pas question de porter de jugement de valeur sur qui ou quoi que ce soit. Sauf qu'il faut appeler les choses par leur nom. La CFDT, premier syndicat de France, n'est plus un syndicat réformiste depuis longtemps. Elle pratique de longue date l'accompagnement de nombreux projets gouvernementaux (toute tendance confondue) ou d'entreprises. Elle met de l'huile dans les rouages et tente de "gratter" un maximum de contreparties. Après tout, pourquoi pas ? D'ailleurs, cette approche a fait d'elle le premier syndicat de France.
Alors, qu'est-ce qui coince avec Berger ? Avant même le lancement de la réforme des retraites, j'avais annoncé et écrit que l'approche du Gouvernement serait en tout point identique à celle mise en œuvre pour réformer la SNCF en 2018. Alors qu'il était de coutume de faire appel aux syndicats d'accompagnement pour faciliter les réformes, Emmanuel Macron fit délibérément l'impasse sur leurs services. Il souhaitait mettre en oeuvre seul et sans aide une réforme qu'aucun Chef d'Etat n'aurait eu le courage de décliner avant lui. C'est ainsi que, privés de point de sortie du conflit, les "accompagnants" de la SNCF avaient été contraints d'errer jusqu'à la fin dans la contestation.
A l'occasion de cette réforme des retraites, le Chef de l'Etat et son Gouvernement ont une nouvelle fois fait l'impasse sur le renfort des partenaires historiques. Comme à la SNCF quatre ans plus tôt, mais cette fois à une échelle bien plus large. Voilà la vraie raison de l'énervement d'un Berger, délaissé, abandonné, et blessé dans son amour propre. La contestation de cette réforme et la mobilisation de la CFDT ne relèvent pas, au départ, du combat d'idée. Elles sont les conséquences d'une confrontation d'égos. . Rappelons pour s'en convaincre que la CFDT est favorable à la disparition des Régimes Spéciaux et à la retraite par points (pire que la réforme actuelle !). Deux hommes se livrent un combat de coqs, par Borne interposée. Au point que la CFDT d'abord réformiste, puis accompagnante, prend désormais des allures étrangement révolutionnaires.