Bouzonville : la SNCF bride les journalistes français !
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« Pauvre SNCF » avait coutume de dire ma mère lorsque mon père lui comptait ses dernières mésaventures de conducteur de train. A l'époque, Il était déjà confronté et révolté par les directives des « Parisiens » qui pourrissaient inutilement son quotidien. Aujourd'hui, on appelle cela plus prosaïquement « la technocratie ».
« Pauvre SNCF », l'expression m'est revenue à l'esprit ce matin, lorsque peu après 8h30, j'ai franchi le pas de la porte de la Gare de Bouzonville rouverte uniquement un jour dans l'année, lors de la circulation du « Train du Vendredi Saint ». Une navette que j'avais mise sur rail en 1998, pour braquer les projecteurs sur l'avenir de cette petite gare où j'avais débuté ma carrière de cheminot.
Juste après m'être rapidement présenté auprès de mes « jeunes » collègues (c'est plutôt moi qui suis vieux), un gamin et sa mère se sont glissés dans l’entrebâillement de la porte. Poli, le jeune a demandé au responsable présent s'il pouvait prendre les installations en photos. Refus catégorique du représentant de la SNCF présent sur place, sous prétexte qu'il est interdit de photographier des installations de sécurité « sensibles ». Il est vrai que si les Russes tombaient sur la photo d'un poste d’aiguillage datant de 1976, les Ukrainiens pourraient redouter le pire !
Une journaliste de France Bleu Lorraine franchit à son tour le pas de la porte. Elle et d'autres confrères souhaitaient consacrer un reportage au retour de la navette franco-allemande après deux années d'absence liées au Covid. Et là, le jeune dirigeant décocha une fatwa tombée tout droit de sa hiérarchie : interdiction absolue de faire des interviews dans l'enceinte de la gare... et même d'enregistrer le son du train lorsqu'il entre à quai !
Les journalistes de France 3 Lorraine subiront un sort identique. Ils seront contraints de filmer l'arrivée du train de l'extérieur des emprises. Le motif officiel de cette rigueur sans précédent ? « La situation particulière de la SNCF... Je ne peux rien dire de plus, c'est confidentiel » précise avec aplomb le dirigeant qui compte deux ou trois ans de chemin de fer...
Je le questionne sur le sort qu'il réservera aux journalistes allemands. Je l'avertis qu'ils ont coutume de descendre du train caméra au poing. Il me répond qu'ils n'y aura pas de passe-droit pour qui que ce soit. Faux, eux filmeront tout ce qu'ils voudront. Ouf, on a évité de justesse l'incident diplomatique !
En 1998, lorsque la première navette est arrivée de l'Allemagne, le Directeur TER était venu constater l'échec de l'opération. Mais malgré une pluie battante, des centaines de voisins Allemands étaient descendus du train spécial, parapluies en main. Il avait été quelque peu déçu de ce succès, mais il ne lui serait jamais venu à l'idée d'interdire aux journalistes d'exercer leurs tâches dans des conditions raisonnables...
Aujourd'hui, le but de l'opération de communication que j'avais menée était de défendre l'avenir du rail, de relancer l'idée d'une desserte internationale entre l'Allemagne et le Luxembourg passant par la France... et Bouzonville. Par son positionnement inadapté, la SNCF s'est tirée une belle balle dans le pied. Elle a donné d'elle un spectacle lamentable.
« On touche le fond », confiai-je à un collègue qui me répondit que les choses avaient bien changé depuis mon départ en retraite.. il y 2 ans. Effectivement ! Pauvre SNCF !
Le reportage tournée par France 3 Nancy (en dehors des emprises de la SNCF !!!). Voir le 12-13 du 15/04/22 : https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/emissions/vos-jt-1213-1920-lorraine
L'article de France 3 : ICI