Grèves : triste Noël pour les Français…

Ceux qui espéraient trouver des trains dans la hotte du Père Noël en seront pour leur frais. Malgré le message, d’ailleurs particulièrement bien écrit, adressé il y a quelques jours par le nouveau Président de la SNCF aux cheminots, la trêve espérée n’aura pas lieu. Et pour cause. Si le rapport de force établi jusqu’à présent entre salariés de tous les horizons et Gouvernement venait à être suspendu, il y fort à parier qu’il ne se rétablirait plus. Par ailleurs, tout conflit qui dépasse une semaine ne peut espérer de sortie brusque. Quand bien même le Gouvernement annoncerait la mise en œuvre d’un moratoire de 6 mois dans la mise en œuvre de ses réformes et la remise à plat de son projet pour les retraites, la défiance a atteint un tel niveau qu’elle ne manquerait pas de s’exprimer encore des jours durant, sous diverses formes. La mécanique des conflits, c'est ainsi.
C’est dans ses conditions que le Premier ministre s’est livré hier à de nouvelles annonces. Feraient l’objet de négociations la « pénibilité, les transitions vers le régime unique de retraites, le minimum contributif et les fins de carrière » ainsi que la « mise en place de mesures favorisant la progressivité de la mise en œuvre de la réforme et le respect des droits acquis » des agents de la SNCF « au statut » (et les contractuels ???). Concernant la RATP, les « avancées sont sur la table ». Tout cela pour conclure, sans surprise, que « le gouvernement ne reviendra pas sur la suppression des régimes spéciaux ». Ni sur la retraite par points, ni sur l’âge pivot, ni sur sa réforme se doit-on d’ajouter. Se lancer dans des négociations après une telle déclaration viendrait donc, de fait, à entériner un recul social majeur. Rappelons-le, dans tous les pays où le dispositif a été mis en œuvre, et à conditions de départs comparables, les pensionnés sont largement perdants.
Dans ses circonvolutions, le Premier ministre tente de se rabibocher, au moins superficiellement, les faveurs de la CFDT. Le premier syndicat français a depuis des décennies toujours plaidé ouvertement pour une retraite par points et la fin des régimes spéciaux, tout en manifestant son opposition au principe d' "âge d'équilibre". Point sur lequel le Gouvernement ne souhaite visiblement par revenir. Cette ligne rouge que s’était fixé ce syndicat si souvent qualifié de « responsable » , l'empêtre désormais dans sa propre fermeté. Comme lors de la réforme de la SNCF (la CFDT aurait été bien inspirée de regarder dans le rétroviseur), Macron reste déterminé à faire passer intégralement sa réforme, avec le soutien ou non des syndicats d’accompagnement. Et tant pis s’il se fâche avec ces derniers. Si victoire il y a, elle n’en serait que plus savoureuse pour son ego.
Revenons-en aux véritables enjeux de ce conflit. Certains pensent, inspirés par le Gouvernement, qu’il ne s’agit que d’une lutte corporatiste visant à préserver exclusivement les Régimes Spéciaux. Ils sont de moins en moins nombreux. D’autres ont compris que la réforme des retraites toucherait chacun d'entre-nous et qu’à moins de travailler plus longtemps (pour ceux qui seront en état de le faire), nous serons TOUS perdants. Soit, mais là résident pas les véritables enjeux du conflit.
La question qui se pose aujourd'hui, c'est quid de l’avenir de TOUS nos acquis ? Car il va de soi que si les Français perdent le bras de fer avec le Gouvernement, celui-ci disposera d’un champ totalement libre et dégagé pour leur imposer une avalanche de reculs sociaux sans précédent. Les deux camps jouent donc leur va-tout. Notre avenir social est sur la sellette. Il appartient à tous d’y réfléchir, de prendre en considération l'importance de ces enjeux, même si les fêtes s’en trouvent quelque peu gâchées.
Le pire, c'est que cette situation de blocages n'est que le fait de l’obstination d’un homme et de ses complices, essentiellement guidés par leur vanité. Dramatique.