SNCF : pourquoi il est trop tard pour éviter la grève

Publié le par Bernard Aubin

 

Le Gouvernement reçoit aujourd’hui "certains syndicats" de la SNCF pour tenter de désamorcer le conflit qui se prépare, ici et ailleurs. Rien que dans cette phrase, l’on peut déjà détecter les limites de sa stratégie mise en œuvre. Pourquoi « certains syndicats » seront ils présents et pas d'autres ? Parce que sur les 9 que comptent la SNCF seuls 4 ont été invités… Première erreur, car lorsqu’il y a le « feu au lac » il serait bien de les inviter tous. Ensuite parce que 2 invités ont décliné l’offre, et pour cause. La méthode Macron est bien connue à la SNCF : « je décide, je mettrai en application, j’ouvre la négociation sur la déclinaison de mon projet, mais en aucun cas je ne reviendrai sur le cœur de ma réforme ». En gros, je vous laisse discuter de la longueur de la corde avec laquelle je vais vous prendre. La méthode a été employée par le Président de la République pour réformer la SNCF. Les cheminots s'en souviennent. Certains syndicats aussi. Enfin, pour en revenir à la première phrase, le fait de recevoir « aujourd’hui » certaines organisation est bien trop tardif. C’est bien avant qu’il eut fallu agir, quand bien même cela n’aurait rien changé. Le dialogue social, ça se bâtit, ça s’entretient au fil du temps, çà ne se décrète pas dans l'urgence... et surtout ça ne se pilonne pas sans à un moment en subir les conséquences.  Décidément, ce Gouvernement ne connaît rien au fonctionnement d’une société, aux alchimies qui donnent naissances aux conflits, et aux Hommes en général…

 

Comme déjà écrit ici à de nombreuses reprises, le Gouvernement a régulièrement alimenté une poudrière depuis son arrivée au pouvoir. Il a même trôné dessus fièrement quelque temps, persuadé de son invulnérabilité. Profitant d’un climat social a priori atone, ses membres ont multiplié reculs sociaux et provocations aussi puériles que dangereuses. Et ont commis là de nouvelles erreurs. Car dans la société française, le feu couvait sous les cendres depuis longtemps, bien avant l’arrivée de Macron. Fait que le Gouvernement a royalement ignoré.  Ce dernier, sûr de son fait, en est même venu à fragiliser les corps intermédiaires, convaincu de leur inutilité, mais qui  auraient pu jouer le rôle de pompiers, avant et après. La poudrière n’a cessé de grossir, tandis que les brûlots allumés çà et là se mutent en incendie incontrôlable. Aujourd’hui, la machine est lancée. Elle risque de tout emporter sur son passage et notamment des dégâts collatéraux que nul ne peut encore imaginer. La France, fragile, est un château de carte qui ne demande qu'à s'effondrer.

 

Les gesticulations de dernière minute seront vaines. Les mesurettes accordées aux hôpitaux, qui au passage négligent les attentes des personnels, l’évocation du « droit du grand père » pour les titulaires des régimes spéciaux et les quelques annonces de dernière minute ne pourront pas faire reculer la mobilisation. Elle est désormais actée dans les esprits. Le ras-le-bol est partout : cheminots, enseignants, personnels hospitalier, policiers, chômeurs, exclus de tous bords… Et surtout, tous se sont convaincus qu’il faut y aller...  que l'action du 5 sera un succès. Allez dire aujourd’hui aux cheminots massacrés par une réforme en 2018, blessés par les propos outranciers d’un Premier ministre et par un dernier rapport de la Cour de Comptes odieux et fallacieux, et traités de « nantis » tous les jours qu’il faut rester de marbre. Quand bien même les deux syndicats reçus aujourd’hui obtiendraient des avancées exceptionnelles, il est trop tard. La coupe est pleine à la SNCF… et ailleurs, et ça fait un certain temps qu’elle déborde. Le point de non-retour est dépassé.

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