MACRON : c'était écrit !

Publié le par Bernard Aubin

 

A la veille des premières grèves et mobilisations contre la réforme du Code du Travail, il n'est pas superflu de rappeler que ce qui arrive aujourd'hui aux salariés était non-seulement prévisible mais aussi planifié.

Sauf à avoir toujours  figuré parmi ses opposants, l'on ne peut sans doute pas reprocher à Macron de faire autre chose que ce pourquoi il a été démocratiquement élu.

De nombreux salariés ont voté pour lui, voire l'ont adulé. Certains d'entre-eux défileront sans remords ni regrets dans les rues, contre celui qu'ils ont hier pleinement soutenu...

L'Histoire est un éternel recommencement. Il y a une dizaine d'années, Sarkozy avait également été élu sur un programme clair, aux relents anti-sociaux assumés, à la stratégie à peine voilée.

Parmi ses électeurs, de nombreux cheminots qui ne cachaient pas leur admiration pour ce candidat bouillonnant. Peu de temps après l'élection présidentielle, 75 % d'entre-eux se mettaient en grève contre la réforme du régime spécial de retraite. Un projet qui figurait pourtant parmi en tête du programme électoral, avec la mise en place d'un "service minimum" dans les transports en commun.

Aujourd'hui, comme hier, la grogne qui monte n'a de légitimité que lorsqu'elle émane de ceux qui n'ont jamais livré de moindre soutien à ces fossoyeurs des acquis sociaux.

Que l'on vienne jamais prétexter la "menace" du second tour des présidentielles pour justifier son vote. Car ce tour était précédé d'un premier où tout était possible. Notamment de ne pas envoyer au second deux candidats qui n'auraient jamais dû y parvenir. Mais pour cela, il aurait fallu réfléchir plutôt que de céder à l'obsession de punir ou de se faire plaisir.

Après l'élection présidentielle, les français disposaient d'une seconde chance de rééquilibrer les pouvoirs en évitant de placer tous leurs œufs dans le même panier... Mais là encore, c'est leur volonté de "virer" à tout prix qui a prédominé... Où alors, pour ces nombreux bobos qui gangrènent notre pays, d'adhérer aux illusions dont ils sont tellement friands. Bilan : les "profiteurs" d'hier ont été remplacés par des Parlementaires inexpérimentés et dociles,... pas forcément inintéressés. Ils ont ainsi ouvert grand la voie à toutes les dérives durant cinq années. Il faut assumer...

Sur le plan syndical, ce n'est guère mieux. D'élection professionnelle en élection professionnelle, les organisations d' "accompagnement" ont accédé à la tête du peloton. Disparait ainsi l'ultime rempart contre le bradage acquis sociaux. Comme pour l'élection présidentielle, il s'agit là de la conséquence directe d'un choix des plus démocratiques. S'y ajoutent les effets pervers de la montée des égoïsmes, individualismes et de l'indifférence, pires ennemis des acquis.

En toute logique, une majorité de français ne devrait donc pas adhérer aux mouvements de protestations programmés le 12 septembre. Mais ce serait partir du principe, bien contestable, que ces derniers s'astreignent à un raisonnement cohérent et assument les conséquences de leurs choix démocratiques.

Pour les autres, qui n'ont jamais voté Macron, ils ont toute légitimité à grossir les rangs des manifestants. Les réformes, elles, toucheront tout le monde. Y compris ceux qui ont vu la menace arriver, qui ont alerté et qui n'ont pas été écoutés. Moralité : il faut bouger ! Mais avant tout, il est temps de se réveiller !

 

Pour mémoire, le post que j'avais publié le 22 mai 2017 sur mon ancien blog, hébergé puis détruit comme tant d'autres par l'Obs.

Un seul changement à y apporter depuis... Si, pour moi à l'époque, Macron n'était qu'un clone de Sarko à la vulgarité près, je me vois contraint de revoir cette approche au vu des propos tenus récemment par le Président de la République sur les opposants à sa réforme : "Fainéants, cyniques, extrêmes".

Désormais, il ne reste plus à l'intéressé qu'à adopter les tics de son prédecesseur, pour en dévenir la copie conforme.

 

La démocratie a tranché il y a peu. Emmanuel Macron vient de débuter son mandat de Président de la République pour cinq ans… Sur le fond comme sur la forme, l’intéressé rappelle l’un de ses prédécesseurs, à la vulgarité près : Nicolas Sarkozy. Un ex-chef de l’Etat lui aussi obsédé par les réformes, la célérité, les effets de scène et qui ne se sentait guère engagé par règles susceptibles de freiner ses élans. Autre point commun, cette propension à habiller ses orientations d’une forme de modernisme, à leur conférer un caractère incontournable, à en dissimuler le goût amer derrière le sucre d’une dragée. De quoi séduire évidemment les partisans de sa politique, la vraie, mais aussi une bobosphère française de plus importante, coupée des réalités, nourrie d’apparences et de séduction.

 

Quelques semaines avant l’élection de Nicolas en 2007, les discussions allaient bon train… dans tous les sens du terme. Dans les rames, de nombreux usagers et cheminots ne cachaient pas leur sympathie pour le candidat et son dynamisme. Lors de discussion parfois très sonores, ces voyageurs affichaient ouvertement leur intentions de vote. Le programme de Nicolas était clair, même plus que celui d’Emmanuel sur certains points. Il s’agissait notamment, dans un premier temps, d’affaiblir les capacités de mobilisation des cheminots par la mise en œuvre du service minimum, de s’attaquer ensuite à leur régime spécial de retraite, et après avoir acquis le champ libre d’imposer un nouveau recul de l’âge d’ouverture des droits aux bénéficiaires du régime général. Ces orientations étaient écrites, publiques. La stratégie apparaissait sans fard à la vue de tous… Encore fallait-il vouloir ouvrir les yeux, et se laisser benoîtement séduire  par de flagorneuses gesticulations.

 

Bilan : quelques semaines seulement après l’arrivée au pouvoir de Nicolas, plus de 75 % des cheminots se mettaient en grève contre le projet de réforme de leur régime spécial… Figurent forcément, parmi ces méchants révolutionnaires, nombre de ceux qui avaient dans les trains et ailleurs affiché leur sympathie pour le nouveau Président. Un chef de l’Etat qui n’a mis en œuvre, du moins sur ce registre, que ce pourquoi il avait été élu… Comment expliquer ce décalage entre le soutien d’un candidat et la défiance sitôt affichée pour une politique pourtant clairement exprimée en amont des élections ? Sans doute parce que dans un monde de plus en plus virtuel, de plus en plus arc-bouté sur les apparences, américanisé, le citoyen français perd peu à peu ses repères. Les circonvolutions flatteuses sont privilégiées au bon sens le plus élémentaire.

 

En 2017 comme en 2007, les français savent à quoi s’attendre. Notamment les salariés. Le projet de réforme du Code du Travail figure dans le programme du nouveau Président. Et n’inspire rien de bon, ni sur la forme, ni sur le fond...  La « Loi Travail » mise en œuvre par François a  débouché sur une nouvelle étape dans l'inversion de la hiérarchie des normes. En clair, les règles portant sur la durée et l’organisation du travail peuvent désormais être moins avantageuses dans les entreprises que celles édictées au niveau aux niveaux supérieurs. Cela dans le cadre d’accords négociés. Or, le résultat d’une négociation ne peut-être juste qu’en cas d’équilibre des forces entre les partenaires, sans quoi c’est la loi du plus fort qui d’office s’appliquera.

 

Or, à l’heure actuelle, il existe un déséquilibre notoire entre les moyens dont disposent les entreprises (DRH, juristes, cabinets d’expertises, heures de travail…) et les représentants du personnel locaux, dont les ressources se limitent souvent à leur investissement personnel et à leur connaissance de la réglementation du travail. Les possibilités de faire pression, et d'orienter les négociations en sa faveur, sont majoritairement du côté du patron. Côté salariés, la montée en force du syndicalisme d’accompagnement ne doit rien au hasard. Elle résulte elle aussi d’une expression parfaitement démocratique, et fragilise encore plus l'équilibre des forces au détriment des travailleurs... qui se sont ainsi tiré une une balle dans le pied.

 

Se pose désormais la question des législatives. Le tout nouveau Président bénéficiera-t-il d’une majorité ? Aux français de décider ! Comme Nicolas, Emmanuel non-plus n’a rien caché. Le Code du Travail, il souhaite le réformer en priorité, et dans la précipitation. Sans rien lâcher sur le fond ni sur la forme de son projet, il essaie de temporiser quelque peu, mais pas trop, avec les confédérations syndicales. Style : on se précipite, mais on offre une illusion de concertation. Cette dernière fait d’ailleurs figure d’obligation. La « loi Larcher » de 2007 la rend obligatoire avant la mise en oeuvre de tout projet touchant à l’économie ou au social… sauf en cas d’urgence. Y aurait-il donc urgence à imposer des reculs sociaux aux salariés ? A remettre en cause les régimes spéciaux de retraite ? Inquiétant !

 

Le Président de la République souhaite légiférer par Ordonnances, c’est-à-dire faire l’économie des débats parlementaires sur ces premiers sujets pourtant majeurs. Encore faut-il que le Parlement l’y autorise ! Ce ne sera possible que s’il obtient le soutien d’une majorité d'élus serviles. Dans le cas contraire, cela lui sera tout bonnement hors de portée. Une question se pose désormais aux français et aux salariés en particuliers. Doivent-ils, en offrant au nouveau Président de la République une majorité parlementaire, lui accorder un blanc-seing ? Une facilité dont Emmanuel Macron a déjà affirmé qu’il userait et abuserait ? A l’inverse, les citoyens doivent-ils dès à présent contrarier la politique du nouveau chef de l’Etat qu’ils viennent d’élire, et rendre ainsi le pays difficilement gouvernable ? De son côté, Emmanuel Macron ne semble guère favorable à la moindre concession... Ça passe ou sa casse.

 

Les législatives approchent. A chaque électeur reste, à ce stade encore, libre de choisir son avenir. Mais une fois le choix fait, dans un sens comme dans un autre, il ne faudra pas se plaindre des conséquences… Mettre un bulletin dans une urne, ce n'est plus, depuis quelques scrutins déjà, un acte anodin ! La cas échéant, il sera toutefois bon de s’interroger sur la pertinence de descendre dans la rue pour combattre un projet pour lequel Macron a été élu... Comme ce fut le cas contre les mesures mises en oeuvre par Sarkozy 10 ans plus tôt... Les français ne sont pas cependant pas à une contradiction près... A leur décharge, le nouveau Président n'a bénéficié réellement que du soutien de 24 % d'entre-eux (résultat du premier tour), point sur lequel il semble devenu amnésique !

 

 

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