SNCF - Grand Est : 3 lignes TER passeront au privé... et ce n'est pas tout !

Publié le par Bernard Aubin

 

Depuis le 20 mars, il n'est plus possible pour un usager du TER Grand Est non muni de billet de régulariser sa situation à bord sans payer un surcoût.

 

Les associations d'usagers sont révoltées... L'amende forfaitaire de 6 euros pour quelques kilomètres, soit plus de deux fois le tarif minimum, ça ne passe pas. Et cela se comprend. Car dans le même temps, la Région ferme les points de vente à tour de bras, renvoyant la clientèle à des automates ou à des gares situées parfois à plusieurs dizaines de kilomètres...

 

Régulariser sa situation à bord auprès du contrôleur ? Encore faut-il en dénicher un à bord. Presque toutes les rames sont désormais équipées de l'EAS (Équipement à Agent Seul) qui autorise la circulation des TER avec le seul conducteur. En 2017, la Région Grand-Est, toujours elle, avait mis sur pied un plan de disparition progressive des contrôleurs à bord des trains au profit de brigades sporadiques et mobiles débarquant dans les gares. Des méthodes qui ont largement démontré leurs limites ailleurs en France. L'absence de contrôleur, comme la disparition des guichets et des personnels SNCF, constituent des appels passifs à la fraude... La même Région qui encourage la fraude, qui transforme l'achat de billet en chemin de croix, va sanctionner le voyageur de bonne foi le jour où il n'aura pas pu se procurer son billet... Cherchez l'erreur !

 

La révolution du rail lorrain ne s'arrête pas là... Et cette fois, elle impactera de plein fouet les agents de la SNCF et les missions de service public jusque là dévolues à cette entreprise...

 

Pour commencer, ce projet de construction d'un nouveau centre d'entretien destiné aux TER transfrontaliers à Montigny les Metz (lire ICI) .... Ironie du sort, cette structure devrait voir le jour dans les murs d'un ex-grand « Entretien » que la SNCF a déserté en 2013. Situé à moins d'une centaine de mètres du « Technicentre Lorraine » SNCF de Metz, ce nouvel établissement devrait en « alléger la charge » selon la Région. En clair, la Région met en œuvre un dispositif d'entretien des TER, qui sera vraisemblablement entièrement privé, qui entrera en concurrence frontale avec son homologue public...

 

 

Cette première étape de privatisation rime aussi avec libéralisation des TER

 

 

La convention TER SNCF Région prévoit une ouverture de 10 % des trafics à la concurrence... Tout cela malgré les excellentes performances de la SNCF sur le périmètre Grand Est, qui arrive souvent en tête de classement ou bon second en terme de régularité. 200 trains supplémentaires quotidiens à coût constant dès 2017, une mise en place du cadencement rondement menée, des gains de productivité constants n'ont pas convaincu les élus lorrains de renoncer au dogme de la privatisation...

 

3 lignes sont concernées dont deux en sommeil

 

La ligne 14, tout d'abord, qui au vu de l'absence d'investissement dans ses infrastructures a dû se résoudre à voir ses trains remplacés par des bus en 2016... L'idée de la Région ? Donner suite à la proposition d'investisseurs allemands qui ont promis de la remettre en état pour 65 millions d'euros et qui l'exploiteront vraisemblablement dans la foulée. Selon quelles normes techniques ? La ligne sera-t-elle retranchée du réseau ferroviaire national, lui ôtant toute perspective d'être empruntée par des trains autres que ceux de l'opérateur privé. Cette ligne essentiellement à voie unique dessert l’itinéraire Nancy-Merrey, le plus direct pour relier Nancy au Sud de la France...

 

La ligne 18 est, elle aussi, en sommeil... Les trains ont été remplacés par des cars fin 2018, sur cet itinéraire reliant Épinal à Saint-Dié. Le 26 février, Emmanuel Macron, s'était engagé à la ré-ouvrir devant un parterre d'élus vosgiens réunis à l’Élysée... Mais la ré-ouvrir comment et avec qui ? Nous y reviendrons.

 

Pour terminer, il y a aussi cette ligne qui relie Saint Dié à Molsheim (et qui se prolonge vers Strasbourg). Des voies qui souffrent aussi de « ralentissements » suite aux défauts d'investissements dans l'entretien de ses infrastructures. Les TER  SNCF y circulent encore... Mais pour combien de temps ? Il y a fort à craindre que les 65 millions investis par la Région pour sa remise à niveau servent à terme les intérêts d'un nouvel opérateur privé...

 

La position de la Région Grand Est

 

La Région assume sa volonté de faire émerger la concurrence sur son périmètre, et ce, malgré les efforts passés et à venir de la SNCF. Cette initiative engendrera forcément des dégâts collatéraux sur l'entreprise publique : plus on lui réduit sa voilure, moins elle devient « rentable » car les coûts fixes ne se réduisent pas proportionnellement au nombre de trains transférés au privé. Avec la privatisation, c'est toujours, au final, le contribuable qui paie la facture des « économies » a priori réalisées.

 

Non seulement la Région Grand Est souhaite faire appel au privé pour l'entretien des TER, pour leur exploitation mais elle l'envisage aussi pour l'entretien et des infrastructures. Elle compte faire appel à des entreprises externes pour assurer la remise à niveau et l'entretien des lignes qui deviendront donc, de fait, 100 % privatisées...

 

En attendant, la grogne monte chez les usagers. Les sanctions prévues à bord, la récente fermeture des guichets en gare de Pagny-sur-Moselle, les perspectives de privatisation défraient la chronique...

Pour tenter de calmer le jeu, le Président de la Région Grand-Est vient d'annoncer l'organisation d'un « Grenelle des Mobilités » en Lorraine en accord avec Élisabeth Borne (ex directrice de la stratégie de la SNCF, Ministre des Transports et fossoyeuse de l'Entreprise Publique).

L'on connaît que trop le résultat de ce genre de grands-messes, maintes fois démontré par le passé.

Prochaine étape, la mise en place de cahier de doléance dans les gares TER... ?

Trop tard, la Région les a presque toutes fermées....

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L
Et oui voilà pourquoi on a fait grève plus de trois mois on savait ce qui allait se passer maintenant faut pas venir pleurer trop tard la casse est engagée au détriment du client. ....
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A
C'est une bien triste fin pour un pays qui avait tout pour réussir le défi de l'équité sociale entre privé public. <br /> <br /> Demain le secteur public disparaîtra. C'est en marche. <br /> A moins d'un soulevement populaire disant stop à une Europe bouffée par les intérêts privés, <br /> le travail sera encore plus alienant, l'estime de l'humain encore plus faible. <br /> Le bout de la course nous mènera à la privatisation des humains en temps que marchandise. C'est nul. <br /> Et comme la majorité des Français se taisent, c'est une caution en bonne et dûe forme qui est faite au marché d'aller toujours plus loin dans la destruction des sociétés civiles. <br /> <br /> Chacun d'entre nous est une partie de la solution. <br /> Il nous incombe d'en prendre conscience et de nous lever. <br /> <br /> N'oublions pas que les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux.
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